Thérèse Aubert

Lorsque j'ai découvert le diaconat à l'Orientation professionnelle, je me suis dit: je suis faite pour être diacre!
Ce qui frappe, d’abord, c’est le sourire. Accueillant et chaleureux, il révèle un intérêt enthousiaste et sincère pour l’interlocuteur. La diacre Thérèse Aubert est tout sourire, toute écoute. Et si ces deux qualités lui semblent être aussi naturelles que respirer, son parcours lui en aura enseigné une troisième : raconter. Raconter la Bible, raconter Dieu parfois. Et exceptionnellement, à l’occasion d’un portrait, se raconter elle-même. C’est alors une histoire de vie pleine de richesses et de sens qui se dévoile.

Membre de l’Eglise du Réveil lorsqu’elle était jeune adulte, Thérèse Aubert a passé huit ans en Afrique à l’occasion de trois missions différentes. «Je serais partie pour conquérir le monde si j’avais pu... Mais c’était il y a longtemps et j’ai beaucoup changé.» Ces expériences seront décisives et lui permettront de grandir. «En Afrique, j’ai particulièrement apprécié le détachement des choses matérielles, la chaleur humaine et la manière de vivre en communauté. J’ai eu la chance de vivre parmi la population Peule, et cela a été un coup de cœur.» Sa troisième mission, effectuée en famille, l’a particulièrement marquée: dans le respect de l’altérité, elle et son mari avaient pour projet de raconter la Bible aux populations locales dont ils avaient appris la langue et avec qui ils s’étaient investis dans le développement agricole. Il devait y avoir un deuxième mandat mais il ne s’est finalement pas reconduit. Lorsqu’elle en parle aujourd’hui, Thérèse vit encore ce non-retour comme un déchirement.
Du continent africain, elle a gardé une nostalgie qui l’a poussée à se réorienter une fois de retour en Suisse. «Lorsque nous sommes revenus il y a treize ans, après un rendez-vous à l’orientation professionnelle, j’ai entamé une formation diaconale dans l’idée de travailler auprès des migrants. Moi qui ai eu le cœur brisé de quitter l’Afrique, je me suis dit qu’ainsi, je pouvais retrouver mes frères et sœurs ici en Suisse.» Après quelques années de pratique, on lui a offert l’opportunité de créer un poste présence et solidarité pour le Nord vaudois. Son travail s’articulait autour de deux axes: la grande précarité et la migration. Grâce à sa créativité et son sens de la relation, Thérèse a mis en route divers projets et créé un réseau pour venir en aide aux plus démunis. Des tâches qu’elle ne se verrait pas accomplir en dehors de l’Eglise. «Je suis une femme de foi. J’ai envie de le transmettre, mais de manière «soft». J’aspire plus à être avec les gens qu’à leur parler de Dieu. Pour moi, la fibre sociale prend donc toute sa dimension si la spiritualité l’accompagne.»

Aujourd’hui, Thérèse Aubert partage son temps entre les migrants du Nord vaudois et l’hôpital de Payerne, où elle est aumônière. Ces deux activités représentent autant d’occasion de rencontres avec un Dieu mystérieux et toujours insaisissable. «Je le nomme volontiers le Tout Autre, car il est présent dans les autres, et en même temps il est complètement différent. Aujourd’hui je préfère le mystère aux réponses toutes faites. L’Evangile, pour moi, c’est comme le récit de Jésus qui écrit dans le sable. Il n’est pas figé dans le marbre : c’est ce qui se passe dans la rencontre qui importe.»
On s’interroge sur ce qui la fait tenir malgré qu’elle mène de front deux ministères émotionnellement intenses. «Mon principal garde-fou, c’est que je vois des personnes autour de moi qui deviennent amères à force d’encaisser, et je ne veux pas leur ressembler. Je ne veux pas me battre contre, mais me battre pour! D’autre part, je crois que je suis un peu protégée par mon enthousiasme et ma naïveté.» Naïveté? C’est plutôt avec profondeur et lucidité qu’elle considère sa mission: «Je ne dis jamais aux gens que je rencontre et qui sont en grande difficulté que ça va aller. Je sais que la vie en décide parfois autrement, j’ai moi-même traversé des moments très difficiles. Mais je peux être présente à leurs côtés, leur amener une respiration. La Résurrection, pour moi, c’est d’abord ces tout petits relèvements.»

Lorsqu’on lui demande si elle a un rêve pour l’Eglise, cette jeune grand-maman répond sans hésiter: «Je voudrais que l’Eglise soit un arc-en-ciel, qu’elle n’ait pas peur d’intégrer toutes ses couleurs, et pas seulement le vert et le blanc de l’écusson vaudois! Elle pourrait ainsi devenir un pont entre le soleil et la tempête.» Cet arc-en-ciel, Thérèse Aubert le construit au quotidien pour amener un peu de lumière dans l’obscurité. Et même s’il ne représente qu’une goutte dans l’océan, elle ne le dira jamais assez: son travail, c’est une chance et un bonheur.
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