Aude Collaud

Etre pasteure me donne l'occasion de me remettre tout le temps en question et d'évoluer avec les autres.
Rendez-vous est donné dans une belle forêt de grands arbres. Aude Collaud s’y sent bien et s’y ressource. «Je déteste être enfermée, j’ai besoin d’oxygène!» Très vite, sa personnalité affirmée transparaît dans sa manière franche et claire de s’exprimer.
On croit volontiers que cette ministre jeunesse du Gros-de-Vaud n’apprécie pas les cloisons, quelles qu’elles soient. Les catégories, très peu pour elle: Aude le dit d’entrée de jeu, elle veut favoriser la rencontre entre les gens par delà leur âge et leurs passions. Un projet qui n’étonne venant d’elle quand on se penche sur le parcours qui l’a amenée au pastorat.
Aude Collaud grandit dans un petit village, dont l’esprit communautaire la marque profondément. Bien qu’elle soit née de parents non pratiquants, elle participe depuis toujours aux activités de l’Eglise. Cela dit, la gymnasienne scientifique se destine plutôt aux professions médicales ou paramédicales, et s’imaginerait bien ostéopathe. C’est en partageant avec sa pasteure qu’elle change d’avis: «Je me suis rendue compte que c’était le contact avec les gens qui m’intéressait, pas seulement le contact physique. Je me suis inscrite en théologie, et quinze jours plus tard, j’ai réalisé que j’y étais bien et que c’est là que je devais être.» Avec Aude, la question de la vocation trouve sa réponse dans la relation et la communauté. 
«Je n’ai jamais ressenti d’appel. J’ai toujours été dans l’Eglise et j’y ai réalisé que ce que voulais vivre avec les gens, c’était une relation, un témoignage, un accompagnement. Et que je voulais en faire mon métier.»
Après les études, les choses ont suivi leur cours avec le stage pastoral et la consécration. Aude se voit alors confier le travail dont elle a envie: un ministère avec les catéchumènes et les jeunes. «C’est l’âge des grands chamboulements! J’ai beaucoup de joie à les voir trouver leur voie. Et quand certains ados ont envie d’être JACKs, de s’engager, on se dit qu’on n’a pas été inutile, que la transmission se fait.» Une transmission que cette jeune maman de trois enfants peut vivre également à la maison : «J’essaie de vivre quelque chose avec eux ensemble et individuellement. C’est une joie que mes enfants aient du plaisir à se rendre à l’Eglise, qu’ils s’émerveillent, découvrent des histoires de la Bible et même témoignent à leur tour malgré leur jeune âge. C’est beau de voir que nous servons à quelque chose!»
Cette énergique bâtisseuse de relations regrette néanmoins que l’Eglise ne s’ouvre pas plus, d’une part à la vie de villages et de quartiers, mais aussi à des collaborations à l’interne. Dans la situation actuelle où les lieux d’Eglise se côtoient sans se croiser et où les pasteurs sont toujours plus seuls dans leur travail, Aude plaide pour le dialogue et l’entraide. 
 «Dans nos Eglises, j’ai l’impression qu’on réinvente la roue un peu trop souvent, et qu’on démultiplie l’offre. Personnellement, j’ai du plaisir lors des rencontres inter-aumôneries. Ce n’est pas évident pour tout le monde, mais ce n’est pas évident non plus d’être seul en paroisse et dans son ministère Il faut créer des choses ensemble. C’est enrichissant pour tout le monde, paroissiens et ministres.»
Sans aucun doute, la jeune pasteure ne vise pas à devenir le modèle théologique ou moral que ses prédécesseurs ont pu être dans le passé. «Je me vois comme un témoin, qui a peut-être appris plus que d’autres la manière de communiquer son témoignage. Grâce à cela, je peux lancer des dynamiques, mais je ne peux pas dire à quoi elles vont aboutir. Je ne veux pas être une pasteure référente. Je préfère être un moteur.» En l’écoutant, on retrouve sans cesse chez elle le bonheur de la rencontre avec l’autre, qui semble faire de sa vie et son ministère un cheminement permanent: «J’ai la chance de vivre avec une communauté à laquelle je ne m’attends pas. C’est toujours l’occasion de me remettre en question. On n’est pas obligé d’être sûr de sa foi et de sa théologie comme on l’a étudiée! On évolue, on découvre, on change. D’ailleurs, on y est encouragé...» Elle ajoute avec le sourire de celle qui est au moins sûre d’une chose: «... et finalement, on est déjà pardonné.»
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